De Cafayate à Salta
Par les Vallées Calchaquies

23 Juin: Nous roulons beaucoup plus qu’à notre habitude car nous connaissons déjà la route qui mène à Cafayate, nous l’avions empruntée il y a deux ans. Nous traversons donc la province de Catamarca, et arrivons dans le principal centre viticole de la région de Salta: Cafayate. C’est un vin d’altitude qui est élevé ici, les pieds de vignes se situent entre 1600 et 2600 mètres, le climat y est très favorable et les sols y sont très fertiles.

Au milieu des vignes survolées par des perruches bavardes trônent de grands cardons, insolite et très beau, ça ne doit pas faciliter les vendanges par endroits!

Les alentours montagneux de Cafayate, à l’époque Précolombienne, étaient occupés par les Indiens Diaguitas. Vers 1480 arrivèrent les Incas du Pérou, puis en 1535 les conquistadores Espagnols. Les témoignages de leur séjour sont nombreux, peintures rupestres, restes de céramiques, terrasses de culture. Leur lutte et leur résistance ont été très importantes, et leur histoire ne s’est pas arrêtée là. Des communautés Indigènes Diaguitas sont encore bien présentes dans la région, ils perpétuent certaines traditions et leur artisanat, céramiques et tissages, est très raffiné.

Mais l’influence Espagnole est plus imposante.

Après avoir pris quelques renseignements sur la piste que nous avons choisi de faire, nous partons à travers les Vallées Calchaquies, la partie que nous n’avions pas encore faite, celle qui relie Cafayate à Salta en passant par Cachi.

Le terme Calchaquies désigne la bravoure des Diaguitas lorsqu’ils se sont heurtés à  l’invasion Inca de 1480.

Et le terme leur va bien, toutes les tribus unies pour se battre contre les conquistadores, ils résistèrent près de 130 ans avant de tomber sous l’ultime assaut lancé par le gouverneur de la province de Tucuman en 1664. Autant dire que celui-là n’aura pas sa statue sur la grand place!

Le ton est tout de suite donné, les maisons en adobe dont on sent une application certaine à l’architecture côtoient d’antiques églises coloniales bien entretenues.

La suite de la piste nous fait de belles promesses, au loin, nous voyons les gorges tourmentées au pied de la rivière Calchaqui qui alimente toute la vallée.

Puis nous voilà au coeur même de ces gorges appelées las Flechas. On se demande vraiment pourquoi...

Grace à cette rivière dont le débit est assuré par la fonte des neiges des montagnes de la Cordillère, les habitants de la vallée peuvent vivre de la culture de l’oignon, du piment et de la vigne. C’est ici, au XVIII ème siècle, que les jésuites plantent les premières pieds de vigne.

Cette alternative à la célèbre route des quebradas de las Conchas, reliant Cafayate à Salta par le côté Est que nous connaissons déjà, (voir carnet Argentine 9) nous séduit presque plus, la route qui n’est pas goudronnée mais qui reste très confortable laisse les paysages plus sauvages, plus bruts. Les minuscules villages de maisons de pisé sont très pittoresques et on approche un peu plus la façon de vivre très rudimentaire et campagnarde des gens de la région.

Alors comme nous avons envie de jouir des lieux, nous trouvons un corral naturel pour profiter de l’après-midi et pour passer la nuit, on se sentirait presque seul au monde au milieu de ce décor.

Et comme nous sommes dans une région viticole, le Thille pense qu’il ne faut plus faire dans le détail, il achète le vin en bonbonne. Alors ce soir c’est un avocat et un gallon de vin! (bon ça va je plaisante!)

24 Juin: Réveil sous un soleil magnifique. Nous poursuivons notre chemin jalonné de villages, de cultures, de montagnes, de cardons dressant leurs silhouettes aux contre-forts des hautes montagnes environnantes.

Puis nous arrivons dans le célèbre petit village de Cachi, perché à 2280 mètres et datant à peu près de la fin du XVII ème siècle. La date de sa fondation n’est pas précise de part son ancienneté, mais les archéologues savent que les environs étaient déjà fréquentés au X ème siècle par la tribu des Chicoanas appartenant à l'ethnie Diaguita.

Ce village est un véritable bijou dans son écrin montagneux de la Précordillère dominée ici par le nevado Cachi, 6380 mètres.

Les rues sont pavées, les murs bas des maisons sont chaulés, les charpentes sont en bois de cardon, le tout est vraiment magnifique. C’est en revanche un peu surfait par le tourisme. Nombreux ateliers et magasins d’artisanat, des restaurants en pagaille où des minis bus touristiques venant de Salta y déposent leurs occupants qui s’y enfournent en masse. En un clin d’oeil, les terrasses sont complètes. Mais nous on s’en fiche, on achète des papuchas (purée de pomme de terre reformée, fourrée de fromage puis frite)  et quelques empanadas à une mamita qui les vend dans la rue avec sa roulotte.

Le cimetière mérite aussi une petite visite, il domine le village et certaines tombes sont très anciennes. Quelques caveaux sont ouverts et les cercueils mis à nu et désordonnés. C’est un peu glauque, on ne sait plus trop si on doit regarder dedans, on craint de tomber sur des squelettes par moment!

Après cette pause, nous traversons le Parc National des cardons sur une ligne droite de 19 km à 3000 mètres d’altitude nommée la recta Tin-Tin, du nom de la montagne qui la jouxte, avant d’attaquer la superbe cuesta des Obispo, une succession de lacets serrés où trône la petite chapelle à son point culminant à 3400 mètres.

C’est la chapelle San Rafael, où les voyageurs déposent des cierges afin de s’accorder la protection de la vierge avant d’attaquer la descente impressionnante qui se présente, et apparemment, celle-ci aime aussi la fumette et la bière.

Les voyageurs du coin l’ont un peu dévergondée!

Le paysage velouté est spectaculaire, un peu plus, on se croirait en plein dans les Andes... Mais pour peu de temps heureusement, c’est vraiment très beau, mais nous n’aspirons plus à ces contrées ventées qui nous glacent rien qu’à y penser. En ce moment, on est plus dans le rêve Amazonien, on s’imagine bien volontiers des jus de maracuya frais sirotés dans un hamac et à chasser les moustiques.

Dans la descente nous suivons un camion qui a le feu au cul...

Un manière de garder le goudron liquide pour coller les catadioptres sur la route toute neuve.

A mesure que nous descendons, la végétation s’étoffe, la chaleur revient progressivement, et nous allons directement à Salta qui n’est plus très loin.

C’est le moment du grand carénage de la Bestiole. Elle mérite bien un peu d’attention pour tous ses bons et loyaux services. Le Thillou se réjouit d’avance de faire les 13 vidanges, vous vous en doutez...